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Le Tribunal Suprême d'Espagne acquitte le club de cannabis María de Gracia (Barcelone) après avoir compris qu'il y avait eu une erreur d'illicéité inévitable.

  • Le Tribunal Suprême d'Espagne a acquitté le président et un membre de l'Association María de Gracia Club de Barcelona en reconnaissant qu'il y avait eu une erreur d'illicéité inévitable (impression d'agir dans la légalité), suite à un rapport du Parquet, qui ne s'était pas opposé à l'inscription du club au Registre des associations, puisqu'il n'avait pas perçu de signes d'infraction dans ses statuts. Cette décision de la Haute Cour marquera-t-elle un tournant après les arrêts précédents qui s'étaient traduits par des peines de prison pour les autres clubs sociaux de cannabis ? Nous vous présentons les éléments clés de ce revirement de jurisprudence du Tribunal Suprême d'Espagne. 
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La Cinquième Chambre de l'Audiencia de Barcelone avait déjà acquitté en mai 2015 les personnes mises en examen du club de cannabis Maria de Gracia, pour lesquelles une peine de prison de six ans était demandée pour atteinte à la santé publique, pour une vente de cannabis supposée avoir eu lieu de manière « indiscriminée » auprès de ses 400 membres. Désormais, la Chambre pénale du Tribunal Suprême a confirmé la sentence prononcée par l'Audience Provinciale et rejette ainsi le recours en cassation qu'a interjeté le Parquet, qui demandait que les dirigeants soient condamnés pour délit de trafic de drogues et d'association de malfaiteurs.

Cependant, l'arrêt souligne qu'il ne partage pas les arguments de l'Audiencia de Barcelone ayant conduit à l'acquittement, car si ce tribunal a prononcé l'acquittement en considérant que les conditions d'une consommation partagée non passible de poursuites pénales étaient réunies, le Tribunal Suprême le fait en raison de l'existence d'une erreur d'illicéité inévitable (impression d'agir dans la légalité) puisque le Parquet ne s'est pas opposé aux statuts de l'association lorsque ceux-ci ont été présentés.

L'association María de Gracia a présenté ses statuts dans le Registre d'Associations de la Generalitat de Catalunya et la Direction Générale du Droit et des Entités Juridiques a procédé à son inscription au Registre le 22 mars 2012, suite au rapport préalable favorable du Parquet Provincial de Barcelone, daté du 1er février 2012.

Dans ce cas, le Tribunal Suprême souligne qu'il existe un élément différentiel par rapport aux autres sentences de cas similaires, comme celle du 7 septembre 2015 ayant condamné les responsables du club de cannabis de Bilbao Ebbers pour les mêmes raisons. Selon le Tribunal Suprême, la nouvelle sentence n'est pas contradictoire par rapport à cette jurisprudence, puisque la différence réside dans le fait que la Direction Générale du Droit et des Entités Juridiques de Catalogne, avant de convenir de l'inscription au Registre des Associations de l'Association María de Gracia, a demandé un rapport du Parquet, ce qui n'avait pas été fait à Bilbao.

Le Parquet catalan s'est prononcé sur le club catalan le 1er février 2012 de manière inéquivoque, en avançant que vu la manière dont étaient rédigées les dispositions statutaires, il n'était pas possible de remarquer une volonté de permettre la consommation illégale de stupéfiants, puisque celle-ci avait lieu dans un espace public, réservé aux membres et que tous étaient majeurs.

La Salle II comprend qu'en raison de ce rapport du Parquet, l'on se trouve face dans le cas du club María de Gracia à une erreur d'illicéité inévitable, qui exclut la responsabilité pénale, puisque les dirigeants pensaient agir selon le droit et en conformité avec la loi.

La sentence explique que le président et le membre de cette association, en consultant le rapport du procureur du 1er février 2012, n'avaient aucune obligation de rechercher une autre source d'information fiable pour s'assurer de la légalité de celle-ci. Ce rapport reconnaissait ainsi explicitement la légalité de l'association et il n'était pas possible d'obtenir une autre source d'information plus crédible à laquelle recourir pour lever tout doute.

La sentence argumente également qu'il est évident que les interventions policières avec saisie de différentes quantités de cannabis auprès des membres présents, ou la saisie dans le siège-même « sont des activités qui constituent la raison d'être de l'association pour lesquelles le parquet n'a apporté aucune objection dans son rapport ».

La différence avec ce que l'on appelle le « cas Ebbers » de Bilbao, selon le Tribunal Suprême, réside dans le fait que le tribunal a alors apprécié une erreur d'illicéité évitable, puisque dans ce cas, les accusés n'ont rien fait pour éviter l'erreur et dissiper les doutes quant à la légalité de leur activité. L'existence d'une erreur, bien qu'évitable, a entraîné des condamnations pénales moins lourdes pour les dirigeants du club Ebbers.

La sentence insiste donc sur le fait que sa décision n'est pas contradictoire avec la sentence du cas Ebbers, puisqu'il existe une différence justifiant une solution autre que celle adoptée lors de la sentence du tribunal de pleine juridiction ayant fait jurisprudence.

Cela implique cependant que le combat juridique des clubs sociaux de cannabis dépendra de l'analyse des circonstances propres à chaque cas, mais davantage de précisions sont encore nécessaires pour connaître les limites dans lesquelles l'activité d'un club cannabique pourrait constituer ou non un délit. Dans l'attente de la réglementation complète, autant ces associations que les utilisateurs qui les composent demeureront vulnérables.

04/07/2016

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